Vers l’homme augmenté ?

Début février, c’était opération « Portes Ouvertes à Xperium » de Lilliad (Université de Lille).

Lilliad Learning Center Innovation, c’est tout d’abord une superbe architecture : vous vous souvenez, on en avait déjà parlé, ici !

Xperium est un espace où sont mis en avant des travaux de recherche, les innovations au-travers d’exposés, d’expérimentations, de jolies maquettes, de challenges à relever sur un thème dédié. Le public et surtout les lycéens peuvent ainsi avoir accès à de l’information « en direct du labo », découvrir le monde de la recherche et les applications innovantes qui peuvent en découler.

Bref, lors de cette opération « Portes ouvertes » de cette année, le public pouvait plonger de le monde des innovations sur la thématique de la saison 3 : « Matériaux et numérique en mutation – Vers l’homme augmenté ?  »
Faute de temps, je n’ai pu visiter que quelques stands mais il n’est pas impossible que j’y refasse un saut dès que cela sera possible.
Voici un petit aperçu des 4 sujets auxquels j’ai pu m’intéresser.

Bon, il ne s’agit pas de faire de nous des « super hommes » aux pouvoirs extraordinaires, mais tout simplement de résoudre des problèmes de santé pour lesquels les solutions actuelles existent mais nécessitent des améliorations par exemple pour un meilleur suivi d’une pathologie ou à cause des effets secondaires à la suite d’un acte invasif.

Réparer l’Humain grâce aux biomatériaux
Que ce soit en raison du vieillissement, d’une pathologie ou d’un accident, on peut être amené à devoir remplacer une partie défaillante de nos organes ou de nos tissus et avoir recours à des technologies réparatrices avec des matériaux innovants !
Ce stand présenté par l’Unité Matériaux et Transformations (UMET, UMR CNRS 8207) et l’Unité de Recherche « Médicaments et Biomatériaux à Libération Contrôlée » (INSERM, U1008) nous entraîne dans les histoires de prothèses, des hernies discales, des hernies viscérales…
En effet, en cas d’hernie, d’anévrisme (dilatation importante d’une partie d’artère), de sténose (rétrécissement d’un canal ou d’un vaisseau sanguin), la solution est la mise en place de prothèses ou endoprothèses :
– filet en polypropylène sur la paroi abdominale pour la renforcer en cas d’hernie,
– fil ou lacet au niveau d’un tendon défaillant,
– endoprothèse pour le traitement des anévrismes aortiques,
– stent dans une artère en cas de sténose (technique de l’angioplastie).

Filet, fil, prothèse de hanche, prothèse discale, endoprothèse pour « réparer » l’humain

Mais le recours à ces dispositifs salvateurs ne se fait pas sans risques ni effets indésirables ; il peut en effet y avoir des complications post-opératoires telles que de l’inflammation, des douleurs ou même dans le cas de la mise en place du stent, le phénomène de resténose : la prothèse se recouvre peu à peu de cellules de l’artère, parfois en trop grande quantité et un nouveau rétrécissement se met en place.
Pour limiter tous ces effets secondaires, on cherche à développer de nouvelles prothèses recouvertes d’un principe actif.
On a donc parlé de la cyclodextrine, une molécule issue de la dégradation enzymatique de l’amidon de maïs : elle est constitué de 6 ou 7 molécules de glucose et adopte une structure en anneau avec une partie extérieure hydrophile et une cavité intérieure hydrophobe.

Endoprothèses artérielles(premier plan), molécule d’amidon et cyclodextrine (arrière plan)

Cyclodextrine

Ainsi l’UMET travaille sur l’utilisation de cyclodextrines greffées sur des prothèses afin d’encapsuler des molécules thérapeutiques, anti-inflammatoires par exemple. L’avantage est que ces molécules sont biocompatibles et biodégradables, elle permettent de libérer progressivement et très localement des médicaments afin d’éviter tout effet secondaire notamment les risques de resténose !

De la molécule au médicament !
On reste dans le domaine du médicament avec le stand de l’Unité Mixte de Recherche 8207 « Unité matériaux et transformations ».
Un médicament, c’est un principe actif et un excipient, ce qui va conférer sa forme, sa couleur, sa stabilité …
Bien sûr la nature chimique des molécules de la substance active est capitale pour que le médicament soit efficace mais leur organisation spatiale va aussi être importante. En effet, soit on a affaire à une organisation périodique des molécules (solide cristallisé obtenu lors de la synthèse), soit on n’a pas de réelle organisation (solide amorphe) et cela joue énormément sur les propriétés du médicament : la biodisponibilité du médicament liée à la stabilité et la solubilité sont fortement dépendantes de cet agencement.

Un cristal est stable et peu soluble tandis qu’un solide amorphe sera soluble mais peu stable.
Lors de la mise en forme du médicament (domaine de la galénique), il faut donc viser à garder la molécule dans l’état où elle sera la plus active : or en cherchant la solubilité avec un agencement amorphe, on perd la stabilité.
Comment résoudre ce paradoxe ?
C’est en jouant sur l’excipient qu’on parvient à résoudre l’équation. Avec un excipient « polymère » dans lequel on vient disperser le principe actif, on réussit à empêcher le rassemblement donc la recristallisation : l’ensemble permet de garder une bonne solubilité tout en augmentant la stabilité.
Les autres approches sont l’insertion dans un mini-tube de dimension nanométrique ou l’enrobage.

Les études sur le médicament ainsi formulé consistent donc à analyser ce qui se passe lors d’une variation de température, lors d’un broyage ou pendant une étape de déshydratation.

Booster nos sens
Vous connaissez les tablettes tactiles ? Elles sont généralement connues pour stimuler nos deux sens : vue et ouïe. Savez-vous qu’il est possible de percevoir aussi des textures en stimulant le sens du toucher ?
C’est l’objet des travaux présentés sur le stand de L2EP (Laboratoire d’Electronique et d’Électrotechnique de puissance) : concevoir une tablette à retour tactile qui nous permettrait de distinguer par un simple passage de doigt un poisson d’un ours en peluche ! Bref, cette tablette permet de « toucher ce que l’on voit ». C’est bluffant !
Ce système joue sur notre perception et modifie la façon dont on perçoit une surface : selon la position du doigt le frottement est différent.

Pour quelles applications ?
On peut imaginer que ce type de tablette pourrait améliorer l’apprentissage de la lecture : la découverte des mots, de leur sens serait stimulée par ce sens supplémentaire.
Une autre utilisation pourrait concerner les personnes mal voyantes pour leurs achats sur Internet.

Comment ça marche ?
Des actionneurs piézoélectriques* sont en oeuvre et permettent de générer des vibrations ultrasoniques qui modulent le frottement du doigt sur la surface : en un mot, l’écran vibre lorsque l’index se déplace, le rendu des textures est donc possible.

* La piézoélectricité est la propriété par laquelle un matériau se déforme sous l’action d’un champ électrique.

L’Internet des objets pour contrôler l’environnement ou la santé
De plus en plus d’objets du quotidien, de capteurs sont capables de communiquer avec le Web ou entre eux : c’est l’Internet des objets (ou IoT). La question se pose alors de leur alimentation en énergie et leur l’autonomie.
C’est la thématique présentée par l’UMR-CNRS 8520 (Laboratoire d’Electronique, de Microélectronque et Nanostructure).
Les applications sont nombreuses et touchent toute une palette de domaines : suivi d’un pont pour surveiller des contraintes et éviter des catastrophes, surveillance des paramètres clé au sein de zones critiques d’une forêt par rapport aux risques d’incendie, monitoring de la tension en cas de glaucome … Tout cela est fort utile, n’est-il pas ? Le déploiement de la 5G pourra d’ailleurs permettre de développer ces objets et les services rendus qui y sont liés.


Pour assurer leur alimentation, on se tourne du côté des micro-batteries ou micro-supercondensateurs. Ces deux systèmes reposent sur le principe de réactions électrochimiques : deux électrodes, un électrolyte contenant des ions qui se déplacent d’une électrode à l’autre. La différence entre les deux systèmes : l’un stocke dans la masse tandis que l’autre (le supercondensateur) stocke en surface ce qui a pour conséquence que l’un stocke une plus grande quantité d’énergie mais l’autre la restitue plus rapidement.

Le challenge est à la fois de concevoir de tels systèmes à une échelle miniaturisée et de jouer sur les matériaux (leur porosité), sur les types d’architecture (3D).

Pour en savoir plus, n’hésitez pas venir visiter cet espace dès que cela sera possible !

Pour en savoir plus :

https://lilliad.univ-lille.fr/xperium/visiter-xperium-saison-3-2018-2020

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