Les petits pois, vous aimez ça ? On peut les trouver en conserve, surgelés ou parfois frais. Mais les avez-vous déjà goûtés tout crus, lorsqu’ils sont encore en cosse si vous en cultivez dans votre jardin ? C’est là qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes : tendres et un peu croquants, sucrés mais pas trop !
Mais peut-être voudriez-vous en savoir un peu plus ? Quelles particularités ? Comment les cultive-t-on en agriculture ? Comment les récolte-t-on ? J’ai eu l’opportunité d’assister à la culture du petit pois (Pisum sativum) dans le champ voisin de chez moi : une bonne occasion d’en savoir un peu plus sur la plante elle-même et la façon de s’en occuper !
La famille
Le « petit pois » fait partie de la famille des Fabacées mais on entend aussi très souvent le terme « légumineuses » et « papilionacées ». Ces appellations ne sont pas toutes complètement synonymes parce qu’elles sont issues de reclassifications botaniques qui se focalisent sur des caractères différents, alors voyons de quoi il en retourne.
Le petit pois est une « légumineuse », une grande famille caractérisant tout végétal dont le fruit est une gousse ! Mais la dénomination de » Fabacées » est adoptée plus récemment pour cette famille en se concentrant sur l’intérieur de la gousse à savoir la « Faba » qui signifie fève.
Les papilionacées, également une ancienne dénomination, concernent les plantes dont les fleurs irrégulières évoquent des petits papillons, très jolis.
On dit aussi que certains types de pois sont des protéagineux, car ils sont particulièrement riches en protéines ce qui les rend d’ailleurs intéressants d’un point de vue nutritionnel.
Une vie en symbiose
Alors, ce qu’il y d’assez incroyable chez ce type de plantes dont les graines sont riches en glucides et en protéines, c’est qu’elles parviennent à utiliser l’azote de l’air (qui, rappelons-le se trouve être le composant majoritaire sous forme de diazote) pour leurs propres besoins, en complément de l’azote minéral déjà présent dans le sol (l’azote entre intégralement dans la synthèse des protéines, acides aminés, acides nucléiques). Par voie de conséquence, les besoins d’azote à puiser dans le sol sont moindres et donc, vous l’aurez compris, une bien moindre quantité d’engrais azoté nécessaire (voire pas du tout).
Mais alors, comment ça marche ? Il y a effectivement de quoi s’interroger car la molécule N2 est plutôt du genre très stable avec une liaison covalente triple donc « très forte » (N≡ N)!
Quand on ne parvient pas à réaliser quelque chose, on demande de l’aide aux « amis ». En retour, on prêtera main forte en cas de coup dur. C’est exactement ce qui se passe ici pour le petit pois (et la plupart des espèces de la famille des Fabacées). Au niveau des racines, des petites protubérances appelées « nodosités » sont le théâtre d’une symbiose établie entre la plante et des bactéries naturellement présentes dans le sol (bactéries du genre Rhizobium).
Une fois associées à la plante*, les bactéries sont capables d’assurer la transformation du N2 en ion ammonium (NH4+) directement utilisable par l’hôte, d’où la nécessité d’avoir un sol bien préparé pas trop tassé !
En échange, les bactéries utilisent les glucides synthétisés par le pois pour leur propre développement.
* l’association plante/bactéries au sein même des cellules racinaires est l’aboutissement de toute une série de processus biochimiques reposant sur des signaux moléculaires émis par chacun des deux protagonistes et un ensemble de réactions en chaînes (passionnante cette histoire d’amour, d’un point de vue scientifique !).
Cette symbiose sera sensible au stress hydrique (on est donc en droit de s’interroger des effets du réchauffement climatique et des sécheresses qui risquent d’être de plus en plus souvent fréquentes).
Les étapes de la culture
Bref, voici un petit reportage en photos des étapes de la culture du pois mise en oeuvre par la famille Béharel.
Après le labour (réalisé avant l’hiver), vient au printemps le travail d’affinage de la terre .
Début mai, le travail de semis est confié à une entreprise spécialisée (Entreprise Cousin) parce que la mise en place nécessite un matériel adéquat (semoirs de précision).
Un petit pois de qualité est celui pour lequel le rendement est élevé, avec une bonne résistance aux maladies (donc moins d’ajouts de pesticides_ sujet abordé dans un prochain post) et qui se récolte bien. Ce choix jouera sur son calibre, son goût, la hauteur de la plante, la précocité et le contenu nutritionnel.
Un dizaine de jours après le semis, les premières feuilles apparaissent.
Après une quinzaine de jours encore, la croissance des plantes est bien partie. Le pois pousse assez vite, ce qui est un bel avantage car cela laisse moins de chances aux adventices de se développer.
Patientons encore une quinzaine de jours pour voir les plans fleurir (nous sommes le 20 juin). On peut observer ici les jolies vrilles en partie supérieure des plantes. C’est une mutation sélectionnée lors de la mise au point de la variété : les folioles n’apparaissent pas au profit des vrilles. Cela joue sur la pénétration de la lumière au travers le feuillage, et permet de mieux résister à la verse (le fait que les plants s’affaissent sous leur propre poids)
Au cours du développement, Mr Béharel m’explique qu’il faut être particulièrement vigilent à la présence d’adventices, notamment les chardons, qui sont récalcitrants et dont les boutons floraux peuvent se retrouver avec la récolte de petits pois (même taille).
Une dizaine de jours encore par rapport à l’étape précédente (nous sommes le 30 juin), les gousses sont déjà bien allongées. Elles n’ont plus qu’à se remplir (formation du calibre) et pour cela le grain doit accumuler des réserves : une période cruciale où la plante est très sensible au stress hydrique.
Une dizaine de jours plus tard (nous sommes le 11 juillet), les pois sont à maturité. Le risque à ce moment-là est la verse : les plantes s’écroulent sous le poids des fruits et la récolte sera plus difficile. Le travail de sélection des variétés en amont permet d’éviter au maximum ce genre de désagrément en limitant une trop grande hauteur de tige.
N’ont-ils pas l’air appétissant ?
Alors c’est parti pour la récolte ? En fait, ce n’est pas aussi simple.
Une des grandes questions est de pouvoir déterminer avec précision quand la récolte peut être démarrée car elle se situe idéalement dans une fenêtre très restreinte (entre 2 et 4 jours). En dehors de la fenêtre idéale, les pertes de récolte peut atteindre 30% et la qualité du produit final peut en prendre un coup. Les sucres du petit pois qui mûrit « trop » se transforment alors en amidon : il y a donc perte de goût et modification de la texture (plus farineux, plus dur).
Bref, comment sait-on de façon objective que le bon moment est arrivé ? C’est par la tendérométrie que s’effectue l’évaluation de la texture. Le tendéromètre est un appareil portatif qui permet de mesurer la force nécessaire pour écraser un certain volume. Au fur et à mesure du mûrissement, l’indice augmente. Mais cela dépend de la variété, de la réserve en eau et de la température. Il doit se situer vers 110 pour les pois réservés à la surgélation et 130 pour les conserves.
On peut donc lancer la récole dès que l’indice jugé suffisant.
La récolte
La machine permettant la récolte est une « cueilleuse de gousses ». Elle doit satisfaire plusieurs critères pour que l’opération soit un succès ! Il faut bien sûr récolter correctement sans endommager le produit tout en évitant les pertes. La pureté de la récolte est également un critère important qui peut remettre en question l’acceptation du produit par l’acheteur : la ségrégation du petit pois (par criblage) se fait au sein même de la machine mais le plus délicat reste la séparation du pois des boutons floraux de chardons dans la mesure où leurs caractéristiques physiques sont proches.
Les fanes, avec les gousses à maturité parfaitement ouvertes, sont rejetées sur le sol par la machine et les pois s’accumulent dans la trémie de stockage.
Les avantages de la culture du pois
Pour la santé humaine, la consommation du petit pois est intéressante : sa teneur élevée en protéines, faible en glucides, sa teneur en vitamines et en fibres…
Bref, les petits pois, c’est la classe… plutôt bénéfique pour la planète (moins d’engrais à ajouter donc moins d’émissions de GES), et pour l’Homme.
Je vous donne rendez-vous dans un prochain article avec un petit film, afin d’en présenter un peu plus sur les machines, la récolte et d’ajouter quelques détails complémentaires (les traitements, les risques).
Références :