Je continue mon petit tour de l’été et je ne résiste pas à la tentation de partager ici, ma visite au Musée de Minéralogie à Paris en Août dernier. Comme c’est l’année internationale de la Chimie (nous en avions parlé ici), un petit focus sur la minéralogie nous permettra de montrer que Art et Chimie ne sont pas incompatibles, bien au contraire !
On plonge ici dans un univers particulier, fascinant, passionnant : un vrai plaisir pour les yeux et je trouve absolument incroyable de comprendre comment la bonne combinaison et l’alignement des atomes à l’échelle microscopique permettent de jouer avec la lumière et produire de tels spectacles : formes, éclat, couleurs, brillance…
Le Musée de la Minéralogie Mines Paris Tech est situé à Paris, sur le Boulevard Saint-Michel, tout proche des Jardins du Luxembourg.
Les pièces de ce bel écrin sont en enfilade et il y a tant à regarder !
La minéralogie, c’est quoi ?
Comment son nom l’indique, il s’agit de l’étude des minéraux ce qui consiste dans les grandes lignes en leur identification, leur caractérisation, leur origine, leur lieu de répartition, leurs propriétés physiques et chimiques.
Alors pour caractériser un minéral, on donne en général les éléments chimiques qui le constituent et dans quelles proportions ils se trouvent (c’est la formule chimique du minéral) mais aussi la façon dont les atomes sont organisés les uns par rapport aux autres.
S’il n’y a pas d’organisation particulière, on parle d’état amorphe. Mais s’il y en a une, c’est qu’il s’agit d’un cristal. Et on décrit le cristal par sa maille élémentaire : la plus petite structure où les atomes s’agencent les uns par rapport aux autres en formant une figure géométrique en 3D (ex : un cube). Puis le cristal n’est qu’une répétition régulière et périodique de cette maille dans toutes les directions. Cela forme des réseaux.
Selon cette organisation, les distances entre les atomes et les plans d’atomes qui jouent sur la compacité, on obtient tout un tas de propriétés différentes … Ajoutez à cela quelques éléments traces qui viennent légèrement perturber les affaires, et l’aspect est modifié (couleur, éclat, propriétés optiques, densité…)
Quelques belles pièces
Voici une petite sélection des belles pièces qui m’ont tapé dans l’œil.
Le quartz : un grand classique à redécouvrir
Beaucoup d’échantillons de quartz sont à admirer. Pourquoi s’y intéresser ? Parce que ce minéral est à base de silicium (agglutiné avec l’oxygène) et que le silicium est partout, c’est d’ailleurs le 2e élément le plus répandu après l’oxygène.
Le quartz est la forme cristalline la plus fréquemment rencontrée de SiO2 (c’est d’ailleurs ce qui constitue les grains de sable).
Il en existe une diversité de formes et d’aspects. Alors admirons !
Lorsque le quartz est suffisamment pur, le minéral est transparent comme le verre (pas pour rien, que son nom vernaculaire est le « cristal de roche »).
De belles associations de minéraux différents peuvent également prendre naissance.
Mais le quartz contient de temps en temps quelques inclusions d’autres éléments chimiques. Le fer par exemple peut remplacer certains atomes de silicium dans le réseau.
Ces inclusions modifient la couleur : une coloration jaunâtre ou plus fréquemment violette caractérise alors ces quartz, pas totalement purs (le fer n’est quand même qu’à l’état de traces, mais ça suffit pour modifier l’aspect).
Parmi les quartz qui contiennent des inclusions de fer, on trouve généralement l’améthyste (qui est bel et bien du quartz) : de beaux échantillons sont à admirer au musée. Cette belle couleur violette est liée à la présence de fer sous un degré d’oxydation élevé (lié à la radioactivité naturelle ambiante lors de sa formation), et des substitutions bien particulières des atomes de Si. On en trouve beaucoup au Brésil et en Uruguay, dans des zones volcaniques.
Des formes de cristaux très variées
Outre leur beauté, les cristaux sont fascinants par la diversité des formes qu’ils peuvent revêtir, au sein même d’ailleurs d’une même espèce chimique (pensons à la multitude de formes d’un cristal de glace).
Rappelons que pour qu’un cristal apparaisse, des conditions bien particulières sont requises et tout dépend :
– des conditions de sursaturation dans la solution mère (c’est-à-dire une concentration suffisante des éléments constituant le cristal qui se regroupent alors en formant un premier germe « solide »)
– des conditions de température et de pression,
– de la présence d’éléments chimiques compétiteurs,
– de la présence de poussières …
Le premier germe formé va alors croître en suivant le schéma de la maille élémentaire ce qui nous donne l’orientation générale du cristal.
Mais la croissance obéit aussi à d’autres principes : le cristal adopte la forme qui présente le minimum d’énergie potentielle.
La croissance est également tributaire de la diffusion des ions, atomes ou molécules qui créent le cristal : un phénomène qui se produit plus ou moins rapidement ce qui joue donc sur la forme finale.
Enfin, les cristaux formés finissent par se rejoindre et s’associer entre eux, mais cela peut provoquer des contraintes
Voici les beaux feuillets de l’hématite qui illustrent bien la croissance !
Comment ne pas évoquer les cristaux de sel (NaCl), ceux qui traînent dans notre cuisine ? Ils forment un sacré beau réseau cubique, tout simplement parce qu’à l’échelle atomique, au niveau de la maille élémentaire, les ions Na+ et Cl–se placent dans un cube, chacun des ions étant entouré de 6 voisins contre-ion.
Cela nous donne par empilage de ces mailles élémentaires :
Je terminerai sur les formes en parlant des dendrites ! Certaines cristallisations favorisent l’apparition des structures ramifiées très allongées comme les branches d’un arbre. Cela peut même ressembler à des figures fractales , comme ci-dessous dans le cas de l’argent.
Mon coup de cœur : l’opale
Faire son choix dans cette ribambelle de cristaux n’est pas chose simple, mais j’ai beaucoup aimé l’opale, séduite surtout les couleurs douces et irisées qui en ressortent, un bel arc-en-ciel de lumière (bien que ce caractère d’iridescence ne soit pas systématique). L’opale est de la silice hydratée qui peut contenir jusqu’à 20 % d’eau. A l’échelle atomique, son organisation se caractérise par un réseau de dimensions et structure telles que la propagation de la lumière se fait par le jeu d’interférences constructives : les différentes longueurs d’onde qui constituent la lumière vont réagir différemment en étant dispersées de façon particulière : c’est l’iridescence.
J’espère que ce bref aperçu vous aura donné envie d’en savoir plus et d’aller visiter ce très beau Musée parisien.
Je devais aussi parler des météorites, une exposition temporaire au Musée, mais je pense que, pour éviter un billet trop long, on évoquera ce sujet une prochaine fois.
Pour en savoir plus
Guide de visite du Musée de la Minéralogie