Plongée dans l’archéologie expérimentale (1/2)

Un petit tour dans l’Histoire au cœur des techniques de construction médiévales et de l’archéologie expérimentale, ça vous dit ?
Cela faisait un sérieux moment que j’étais tentée par une visite sur le site de Guédelon. Ainsi en juillet 2019, une promenade culturelle, en famille, sur ce chantier impressionnant a stimulé tous nos sens et nos neurones ! Pour le visiteur, quel qu’il soit, c’est une sacrée belle plongée dans l’Histoire qui est proposée grâce à cet énorme chantier scientifique et pédagogique, démarré en 1997 et ceux qui le font vivre.

Construction du Château de Guédelon : à la découverte des techniques médiévales !

Guédelon en 5 questions
C’est quoi ?
Il s’agit d’un château fort qui porte le nom de Château de Guédelon en cours de construction. Mais la construction est particulière car elle repose uniquement sur des techniques, des ressources et des moyens mis en oeuvre au Moyen-âge (plus précisément du XIIIe siècle). C’est plus exactement un chantier d’archéologie expérimentale : les différents corps de métier travaillent comme on pense que cela se passait au Moyen-âge ! Il y a donc en amont et pendant toute l’étape de construction, un travail d’échange avec des scientifiques archéologues (l’INRAP).

Pourquoi ce nom ? Le chantier se situe en Bourgogne, dans l’Yonne et plus précisément dans la commune de Treigny. Mais la forêt qui entoure le chantier porte le nom de « Guédelon ».

Pourquoi ce site ?

Le choix s’est porté sur ce site, car de nombreuses ressources y sont présentes utiles pour la construction : la forêt de chênes pour le bois, les matériaux du sol (terre, pierres, sable, argiles, minéraux…). Nous sommes ici sur une carrière de grès ferrugineux, idéal pour fournir la matière première que sont les pierres du château. Mais encore faut-il acquérir le savoir-faire pour parvenir à associer et transformer efficacement ces matériaux !

Pourquoi un chantier dans de telles conditions ?
Tout simplement parce qu’il reste encore beaucoup d’inconnues dans la compréhension des techniques et méthodes utilisées pour la construction d’ouvrages anciens avec les moyens de l’époque. Ainsi de nombreuses questions restaient sans réponse sur la façon dont on organisait le chantier, dont on pouvait tailler la pierre « à la main », ou hisser des blocs sans l’aide d’une grue ou quels matériaux utiliser (et comment les associer) pour une construction qui dure dans le temps …
Bref, c’est bel et bien un chantier scientifique !

Quelle durée de construction ?
Le chantier a démarré en 1997 et le château sera vraisemblablement terminé d’ici 2025 (mais rassurez-vous, d’après quelques confidences recueillies sur place, un autre projet se dessinerait et prendrait le relais !). Bref, 22 ans d’expérimentation, ça compte !

D’un peu plus près

Le projet de château
Les châteaux de l’époque médiévale sont à la fois des structures défensives et un lieu de résidence pour le seigneur. On va donc retrouver à Guédelon des éléments classiques pour servir ces deux fonctions. Ainsi pour assurer la défense, le château est équipé :
– de tours défensives – au nombre de 6- dont une plus grande tour (dite la tour maîtresse),
– de hauts murs (ou courtines) et de murs épais,
– d’un chemin de ronde avec des merlons (parties saillantes) et des créneaux (parties vides),
– d’ouvertures verticales sur les tours pour tirer à l’arc ou à l’arbalète (les archères),
– d’un hourd : une galerie en bois qui orne l’une des tours et dont le sol percé permet de lancer des projectiles.

Maquette du château de Guédelon terminé

Où en est-on ?

Chaque année, le chantier ouvre de mars à novembre et tous les corps de métiers (on en parlera dans la partie 2/2) se remettent au travail pour une nouvelle saison. Cette période est propice du point de vue de la météo : les risques de gel préjudiciable à la tenue du mortier sont plus limités.

La tour maîtresse (à gauche) en cours d’élévation et la tour de la chapelle plus avancée (couverture de la charpente en cours)

Les courtines avec les merlons et les créneaux

La tour maîtresse, la plus haute (28,50 m)

Les archères (pour tirer à l’arc ou à l’arbalète)

Cette année (2019), les œuvriers qui ont mis en place la charpente de la tour de la chapelle en 2018 (une charpente en poivrière) finissent la phase de couverture avec des tuiles en terres cuite.

Pour les lieux de vie du seigneur, un logis seigneurial « tout équipé » est prévu, avec la cuisine, le cellier, la salle de réception, une chambre. Non loin de là, un passage couvert permet d’accéder à la chapelle.

Le logis seigneurial

Le logis seigneurial et la tour maîtresse (à droite)

La tour de la chapelle (22m) et l’appentis pour y accéder en provenance du logis seigneurial

A l’intérieur du logis, on y trouve la cuisine avec une large cheminée pour y faire cuire le pain…D’ailleurs, pour le pain, il faut de la farine -obtenue par broyage de différents types de grains de céréales- ce qui requiert un moulin. C’est pourquoi tout proche du château, comme il est coutume d’en trouver à l’époque, un moulin a été construit. Il s’agit bien là d’archéologie expérimentale afin de comprendre le mécanisme d’un moulin hydraulique de l’époque, le construire et le rendre fonctionnel (le moulin sera présenté dans la seconde partie).

Le four pour la cuisson du pain

Le cellier (rez-de-chaussée du logis)

On accède à la salle de réception située à l’étage par un long couloir étroit…

Et on se retrouve dans la salle de réception… admirez la charpente !

La salle de réception

Puis la chambre du logis, avec ses peintures inspirées d’enluminures du XIIIe siècle, utilisant aussi des ressources locales (pigments issus de minéraux naturels) …

La décoration de la chambre seigneuriale

N’oublions pas la grande prouesse technique, réalisée en fin de saison 2018 : la mise au point de la première fenêtre du château.

La 1e fenêtre du château.

Fenêtre de la chambre

Beaucoup de réflexions, d’analyses et de recherche pour trouver comment réaliser une fenêtre au sein d’un château fort ! Comment assurer la transparence et la protection sans utiliser le verre ?

C’est finalement la solution de la peau de chèvre tendue sur un cadre en bois de chêne puis huilée (un parchemin) qui a été retenue et mise en oeuvre au niveau de la chambre seigneuriale. Une riche peinture inspirée d’enluminures a été ajoutée sur la partie haute de la fenêtre.

 

Et un petit tour du côté de la Chapelle, lieu de culte primordial pour le Seigneur, située à l’étage de la tour du même nom ! Une tour qui n’est d’ailleurs pas cylindrique ce qui a rajouté de la difficulté pour la charpente.

La tour de la chapelle, n’est « arrondie » que sur une partie. C’est la rencontre entre deux plans et une partie cylindrique.

La charpente en poivrière de la tour de la chapelle en cours de couverture (Juillet 2019) !

La voûte dans la chapelle !

Inutile de vous dire qu’on a tous adoré la visite… et que j’ai encore plein de choses à détailler de ce que j’ai vu et fouillé pour mieux comprendre : les métiers, les techniques, les challenges et les recherches scientifiques associées !
En résumé, comment font-ils pour que ce château prenne vie ? Quelles techniques ont-elles été (re)découvertes ?
A très bientôt pour la seconde partie : ici.

Pour en savoir plus
https://www.guedelon.fr/fr

 

3 comments for “Plongée dans l’archéologie expérimentale (1/2)

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