Lille, les 120 ans de l’Institut Pasteur et la diphtérie.

L’Institut Pasteur de Lille fête actuellement ses 120 ans ! En effet, c’est en avril 1899 que sont inaugurés les bâtiments construits au sein du quartier Saint-Sauveur ! Mais au fait, connaissez-vous le pourquoi d’un tel Institut à Lille ?
Il faut remonter quelques années plus tôt, en 1894, pour comprendre. Le quartier Saint-Sauveur de Lille, en plein essor économique, abrite de nombreux ouvriers travaillant dans les industries textiles (notamment des filatures de coton et de lin) mais ils vivent dans des conditions déplorables. Le manque d’hygiène, les pénuries d’eau, la sur-occupation des logements -qui datent parfois du Moyen-Age- favorisent le développement d’épidémies notamment la diphtérie qui touche particulièrement les enfants : la contagion étant forte, les symptômes impressionnants avec la mort comme issue, la maladie est particulièrement redoutée.

La diphtérie, c’est quoi ?
Cette maladie se caractérise par l’apparition progressive de membranes dans la gorge, une sorte de peau qui fait craindre aux médecins de l’époque un risque d’étouffement. En réalité, la maladie touche non seulement les voies respiratoires mais aussi le cœur, les reins et le système nerveux (entraînant la paralysie) car le danger vient de la toxine produite par les bacilles responsables de la maladie qui, voyageant par voie sanguine, s’attaque aux organes cités précédemment.

La compréhension de la maladie et les traitements

Ce sont deux bactériologistes allemands Klebs et Löffler qui, en 1884, mettent le doigt sur la bactérie responsable de la maladie. L’un la découvre au niveau des lésions des personnes touchées et le second l’isole et parvient à la cultiver. On parle alors du Bacille de  Klebs-Löffler.
Le Bacille (bactérie en forme de bâtonnet) se multiplie au niveau du larynx et fabrique une toxine qui se répand dans tout l’organisme et se fixe sur les organes.
Emile Roux, médecin bactériologiste, disciple et collaborateur de Pasteur, travaille sur la compréhension de la maladie et montre que c’est bien la toxine qui provoque les symptômes les plus préoccupants de la maladie et la mort par empoisonnement !

Emile Roux, bactériologiste, bras droit de Pasteur, met au point le sérum anti-diphtérique.

Au départ, les seuls moyens de lutte existant, ne reposent que sur l’asepsie pour tenter d’éviter la contagion ou l’administration d’une solution antiseptique au niveau de la gorge.
Dès lors qu’on a pu mettre en évidence la bacille et sa responsabilité dans la maladie, le diagnostic des personnes malades s’est fortement amélioré et Emile Roux enseigne la technique de diagnostic à l’institut Pasteur. Cela permet une meilleure prise en charge mais c’est loin d’être suffisant et la maladie reste mortelle.

Emile Roux connaît aussi très bien la méthode de culture idéale du bacille de façon à produire la toxine, la conserver et l’inactiver. C’est en 1894, que la mise au point d’un traitement contre la diphtérie marque un véritable tournant ! La toxine injectée à des chevaux induit leur immunisation et la production d’une antitoxine.

Premier cheval anglais inoculé, pour la production de sérum antidiphtérique (1894).

En récupérant le sérum de ces chevaux immunisés, et en l’injectant à l’homme, on s’aperçoit qu’on parvient à guérir cette terrible maladie infectieuse. C’est la naissance de la sérothérapie.

Bien sûr, beaucoup de recherche et de tests ont été nécessaires (menés simultanément à Paris et à Berlin) pour  optimiser la procédure de façon à obtenir un sérum efficace et non toxique pour l’homme. Les essais sont concluants puisque la mortalité recule nettement (sauf en cas de surinfection liées à d’autres pathogènes ou lorsque la maladie est déjà bien installée) et l’infection régresse rapidement dès la prise en charge du malade.
Emile Roux annonce officiellement la réussite des essais cliniques lors d’un congrès scientifique à Budapest en septembre 1894 mais il en avait déjà touchés quelques mots lors d’une communication publique à Lille quelques mois plus tôt.

La naissance de l’Institut à Lille
Le maire de Lille a connaissance des travaux de Louis Pasteur et d’Emile Roux sur la sérothérapie. Désireux de sauver les populations de Saint Sauveur, il se rapproche de Pasteur qui lui conseille de fonder un laboratoire d’Hygiène. Sur place, du sérum pourra être fabriqué, et administré aux populations et des conseils d’hygiène visant à limiter le développement du microbe et la contagion seront dispensés.

Pour agir rapidement, un laboratoire temporaire prendra racine dans le Vieux Lille en face des quais de la Deûle, à la Halle au Sucre, mais c’est bien au cœur de Saint-Sauveur que sera construit l’Institut. La première pierre est mise en place dès 1894 et l’inauguration se fait en avril 1899.

Cela fait donc 120 ans que l’Institut Pasteur de Lille oeuvre pour comprendre les maladies infectieuses et autres maladies avec des chercheurs passionnés et passionnants. L’Institut a profité de cette date anniversaire pour remercier ses donateurs et bénévoles en organisant une soirée pour expliquer les dernières recherches, les espoirs, les besoins !

Nous, à l’Institut Pasteur de Lille, pour fêter les 120 ans.

En particulier, Fabien Delahaye, jeune chercheur arrivé dans les lieux il y a quelques mois, nous a présenté ses travaux sur l’épigénétique et les cellules souches du cordon ombilical du bébé à la naissance afin de comprendre l’apparition de maladies plus tard à l’âge adulte ! C’est passionnant.
On en reparle très vite dans un prochain billet !

En attendant, n’hésitez pas à visiter le Musée pour en savoir plus !

Sources pour aller plus loin
https://halshs.archives-ouvertes.fr/file/index/docid/335350/filename/Culture_of_standardization.pdf
https://hal-pasteur.archives-ouvertes.fr/pasteur-01588486/file/Gachelin_naissance_biotechnologies_pharmaceutiques.pdf

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