Miel : du sucre prédigéré mais pas seulement

Le miel, substance onctueuse et sucrée par excellence ! Il n’a pas fini de nous étonner et certaines études récentes viennent encore de dévoiler certaines vertus intéressantes.

Intéressons nous d’abord à ses spécificités sucrées.

Quoi qu’en disent certains régimes, notre corps a besoin de sucre, c’est indéniable ! Il est indispensable car c’est la source d’énergie de nos muscles (y compris cerveau, coeur) afin de répondre efficacement à une sollicitation (un mouvement ou un effort par exemple).

QUe sont les sucres, d’où viennent-ils ?

Les sources premières de sucre pour l’industrie alimentaire sont diverses mais ne sont pas légion :
– la canne à sucre, particulièrement cultivée dans les régions aux climats tropicaux
– la betterave, une plante cultivée plutôt en Europe du Nord,
– le miel fabriqué par nos chères abeilles.
Je ne parlerai pas ici du stevia, plante dont des extraits purifiés en poudre sont récemment apparus sur nos tables (autorisation ministérielle de janvier 2010) sous forme d’édulcorant. Objet d’un futur post, je pense.

Tout d’abord, que sont les sucres ? On parle aussi de glucides, ou plus historiquement d’hydrates de carbone, ce dernier terme présente l’avantage de faire connaître d’emblée les atomes qui les constituent : le carbone C, l’hydrogène H et l’oxygène O. Ceux-ci s’organisent sous forme d’un squelette carboné, de fonctions alcools (-OH) et aldéhydes  (COOH) ou cétones (R-CO-R’). On en distingue différents types.

Les sucres dits simples (encore appelés « oses ») tels que le glucose, fructose, galactose (C6H12O6). Ce sont des molécules de relative petite taille qui passent facilement entre les membranes des cellules et sont directement assimilables par notre organisme, sans digestion (le glucose du sang passe dans les cellules par l’intervention de l’insuline). Ils possèdent tous la même constitution (même formule chimique) et se distinguent uniquement par la position de la fonction alcool. Chaque entité peut ensuite prendre plusieurs configurations dans l’espace, selon l’affinité entretenue avec le milieu (solvant) dans lequel il se trouve. Cela modifie également les propriétés comme la solubilité et la cristallisation. 
Source : Barbora Bartova (dreamstime.com)

 Mais les sucres simples peuvent s’associer à deux (avec perte d’une molécule d’eau tels le saccharose ou sucre de table), trois molécules voire bien plus sous forme de longues chaînes. Pour ces derniers, on les appelle macromolécules qui se trouvent dans différentes configurations et donnent les éléments essentiels au règne vivant tels que:

 – l’amidon : réserve de nutriments et d’énergie des végétaux

– la cellulose qui constitue les parois des cellules végétales (entre 200 et 14000 molécules de glucose associées)

– la chitine : principal constituant de l’exosquelette des insectes et crustacés,

– le glycogène, équivalent de l’amidon mais pour l’organisme humain (et les animaux en général) : une association de nombreuses molécules de glucose. Il est stocké dans le foie et les muscles. En cas de besoin, des enzymes viennent couper cette longue molécule pour reformer le glucose (hydrolyser est le terme consacré)

– sans oublier le désoxyribose que l’on retrouve dans la molécule d’ADN, notre patrimoine génétique.

 Molécule de saccharose, source : ICI

Ces associations à partir d’au moins deux sucres simples constituent les sucres complexes. L’hydrolyse totale d’un sucre complexe donnera des sucres simples tels que glucose, fructose, galactose.
Ainsi, dans notre organisme, ils sont digérés plus ou moins rapidement selon le nombre d’unités de sucre simples. Les plus grosses molécules, longues chaînes sucrées se digèrent lentement (par exemple l’amidon contenu dans le riz, les pâtes) car doivent être cassées, hydrolysées dans la bouche, le pancréas et/ou l’intestin pour faire apparaître la brique de base d’un sucre simple. On comprend ainsi mieux l’expression « sucres lents ».

Sucre et goût sucré [1]

Il n’y a pas corrélation entre la définition du sucre telle que nous venons de la donner et le pouvoir sucrant d’un sucre, c’est-à-dire le goût doux et agréable du « sucré » qui notons-le est une valeur subjective, variable d’une personne à l’autre selon sa sensibilité.

Réciproquement, des molécules qui ont un goût sucré, ne sont pas forcément des sucres au sens chimique du terme (ex : l’aspartame est une association de deux acides aminés)

Généralement, les sucres simples sont ceux qui ont un goût sucré directement appréciable par nos papilles : le fructose qui nous fait apprécier les fruits, ou le glucose (présent dans les fruits aussi).Ces deux sucres n’ayant pas le même pouvoir sucrant.
Deux sucres simples unis chimiquement (appelés disaccharides) peuvent posséder aussi le goût sucré. Ainsi, le sucre de table qui agrémente nos breuvages et nos desserts est constitué de saccharose (encore appelé sucrose), association d’une molécule de glucose et de fructose (avec élimination d’une molécule d’eau entre eux, ce qui les lie, le terme consacré est « condensation », équivalent à une déshydratation). C’est le terme « saccharose » qui est à l’origine du mot « sucre ».

Par contre, les sucres complexes n’ont pas de goût sucré car les sucres simples y sont imbriqués dans de longues chaînes. Une molécule aura du goût sucré pour deux raisons : elle est soluble dans l’eau d’une part (donc dans la salive) et d’autre part, elle peut s’associer à nos récepteurs/papilles car elle ont la bonne « clé ». Mais nous n’irons pas beaucoup plus loin ici car les relations entre la structure et la saveur d’une molécule est un sujet complexe qui motive bon nombre de recherches actuelles.

Quels sucres dans le miel ?
La différence essentielle entre le miel et les sucres qu’on peut trouver via l’industrie alimentaire (sucre de canne et sucre de betterave) est que le premier contient quasi exclusivement des sucres simples (fructose et glucose). ce sont donc des sucres quasiment « prêts à l’emploi » pour l’organisme humain.

Les compositions moyennes sont les suivants : 38 % de fructose (maximum 44%) / 30 % de glucose / 7 % maltose et 1.5 % de saccharose.

Pourquoi une si forte concentration de sucres simples et une si faible concentration de sucres associés ? (seuls ces derniers nécessiteront dans notre organisme une digestion)

Le sucre du nectar des plantes
Formé à partir de nectar des fleurs, la synthèse du miel met en jeu des processus biochimiques, et physico-chimiques à la fois simples (sur leur principe) et élaborés (de nombreuses étapes).

Source : ICI

Le nectar est une substance liquide sucrée (20 % de sucres environ) produite par certaines plantes au creux du calice. Celui-ci se forme en vue d’attirer les insectes pollinisateurs (une façon d’accroitre les chances de la plante de se reproduire en utilisant l’insecte pour faire voyager son pollen). L’eau voyageant des racines vers le haut de la plante dissout des sucres ; quand plusieurs conditions sont réunies (absence de sécheresse par exemple, maturité de la plante), des glandes spécifiques expulsent ce liquide sucré contenant environ 20 % de sucre.
Les caractéristiques du nectar sont différentes selon les plantes : volume produit, concentration en sucres et nature de ces derniers (soit du fructose, soit du glucose soit du saccharose). Par exemple, le nectar d’acacia est riche en fructose ce qui donnera un miel riche en ce même sucre.

L’élaboration du miel

Grâce à sa trompe, l’abeille butineuse aspire le nectar et le stocke provisoirement dans son jabot (pas de descente vers l’appareil digestif de l’abeille). De retour à la ruche, l’insecte régurgite le nectar, qui se trouve vite réabsorbé par une autre abeille qui régurgite à son tour etc Ce processus est réitéré un grand nombre de fois. Au fur et à mesure de cette opération surprenante, tout du moins pour nous « humains », deux phénomènes s’opérent :
– l’eau du nectar s’évapore peu à peu ce qui, par voie de conséquence, l’enrichit en sucre,
– les glandes salivaires des abeilles contenant des enzymes, transforment les polysaccharides (le saccharose / le maltose) en sucres simples, comme s’il s’agissait d’une « pré-digestion ».
En résumé, le nectar s’est transformé en miel.

S’ensuit alors un processus de maturation dans la ruche : la température élevée et la ventilation favorisent une évaporation supplémentaire jusqu’à atteindre une concentration de 80% en sucres (soit les proportions inverses par rapport au nectar de départ).

Source : ICI

Parfois, les miels passent entre les mains des industriels qui y ajoutent des sirops de sucres riches en amidon. Un miel contenant de l’amidon est donc le signe qu’il est passé entre les mains de l’homme puisque le nectar et le miel produit par l’abeille n’en contiennent pas au départ.

Des sucres simples et d’autres vertus
On prête également au miel des vertus antibactérienne voire antibiotiques. Jusqu’à très recemment, on ne savait que peu de choses sur ces propriétés, en particulier, quelle(s) molécule(s) produisai(en)t ces effets antibiotiques.
Les  connaissances portaient jusque là  sur le péroxyde d’hydrogène (eau oxygénée), méthylglyoxal contenus dans le miel. Un étude hollandaise datant de 2010 [2], a montré que les propriétés antibactériennes viendraient surtout d’une protéine appelée « défensine », ajoutée au miel par les abeilles lors du processus de fabrication. Il s’avère que le miel s’est montré très efficace contre une large palette de bactéries (toutes pathogènes sur l’homme) et toutes résistantes aux antibiotiques classiques.

A quand le développement d’un nouvel antibiotique à partir de cette molécule ?

Pour en savoir plus

http://fr.wikipedia.org/wiki/Stevia
http://fr.wikipedia.org/wiki/Glycogène
http://fr.wikipedia.org/wiki/Saccharose
http://www.i-dietetique.pro/?action=articles&id=8258
http://fr.wikipedia.org/wiki/Glucose
http://www.apiservices.com/articles/fr/chimie_miel.htm
http://cabanedetellus.free.fr/Plantes_mellif%C3%A8res.html
http://apiculture-populaire.com/miel.html
http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/medecine/d/vers-un-nouvel-antibiotique-a-base-de-miel_24290/
http://rucherdusaule.fr/index.php/le-miel-cest-quoi-
[1] Hervé This, « Les secrets de la casserole », ouvrage aux Editions Belin
[2] Kwakman, Te Velde et al., « How honey kills bacteria » FASEB Journal. 2010 Jul;24(7):2576-82. Epub 2010 Mar 12 . Abstract : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20228250

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